La création de cet observatoire répond à des besoins identifiés à la fois de la part des acteurs externes et internes du réseau de Cultures du Cœur. Il est innovant car il répond à la problématique unique de la médiation culturelle dans le champ social. Il a une démarche de recherche/action liant l’approfondissement théorique à la pratique professionnelle.
L’observatoire part des constats observés dans notre réseau interne, externe et de partenaires qui pourront y contribuer.
Ces besoins partent des observations suivantes :
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Nous partageons au sein de notre réseau des valeurs, des principes et une vision commune de la médiation culturelle dans le champ social à même d’être diffusés. Ces valeurs renvoient à notre conception de la médiation culturelle dans le champ social et à la déontologie que nous lui associons. Les principes qui vont être énoncés ici définissent des manières de concevoir et d’associer l’action sociale à l’action culturelle. Ils sont issus d’une expertise de terrain partagée par l’ensemble de notre réseau. Ces principes conditionnent les actions de médiation culturelle que nous menons depuis vingt ans et définissent les projets de nos structures territoriales. Notre action nous conduit, à travers cette déclaration, à promouvoir une vision spécifique de la médiation culturelle quand elle s’exerce dans le champ social et à en défendre les enjeux sociétaux.
Cette déclaration est conçue comme la base de notre observatoire de la médiation culturelle dans le champ social et a pour vocation de synthétiser les fondamentaux qui nous unissent, en partant des actions de terrain.
Elle s’adresse aux acteurs du champ social et du champ culturel, aux étudiants, enseignants, artistes, aux politiques, et à tout citoyen à même d’investir le champ de la médiation culturelle dans le champ social.
Nous considérons l’exclusion culturelle comme un facteur de relégation sociale. Dans toutes nos actions nous préconisons un égal accès de tous à la culture et à ses équipements comme un droit fondamental. Cette notion est à rapprocher de celle de biens communs et partageable des contenus culturels. Nous partons du principe que cet équilibre n’est pas atteint, non seulement pour des raisons économiques mais aussi des représentations et des freins symboliques qui éloignent d’emblée les publics les plus vulnérables de certaines de nos institutions culturelles. Subsistent dans notre société des clivages, un fond vif de domination qui s’exerce sur l’individu et limite la capacité des publics à fréquenter librement un théâtre, un musée, une salle de concert… Et s’y sentir à l’aise. La médiation culturelle conçue comme un accompagnement au long cours contribue à lever ces barrières et à favoriser l’exercice de cette égalité de principe entre les individus. Il s’agit bien de défendre une égalité de droit, d’accès aux pratiques et aux biens culturels
Notre action entre en résonance avec la réaffirmation des droits culturels : respect de la diversité culturelle, respect de la culture de chacun, liberté de vivre son identité culturelle, égalité d’accès aux ressources culturelles. Cultures du Cœur tient à intervenir prioritairement sur le terrain de l’exclusion sans pour autant tracer une ligne tautologique entre grande pauvreté et une prétendue pauvreté culturelle. L’approche globale du travail social est un principe à conserver lors des sorties ou pratiques culturelles. La culture et ses pratiques associées sont comme des ferments vitaux contre toute forme d’exclusion. Si la nourriture et les soins sont prioritaires, la sortie culturelle et les pratiques que nous lui associons peuvent s’articuler avec ces fondamentaux et constituer un levier d’insertion. Nous sommes convaincus que la culture contribue à l’insertion dans le sens où elle suscite de nouvelles dynamiques de rencontres, d’actions, d’initiatives.
Nous refusons dans nos principes les événements culturels essentiellement dédiés aux publics défavorisés. Nous affirmons que toute proposition culturelle qui serait exclusivement destinée à des publics démunis ne ferait que renforcer leur situation. L’existence d’une diversité culturelle est une richesse sur laquelle chaque médiateur peut s’appuyer. Nous pensons que la mixité de conditions, d’âge, d’origine est une richesse à partager, un vecteur d’insertion et un des moyens les plus évidents de contribuer au vivre ensemble. C’est dans le brassage des publics que notre projet puise sa force et ses fondements. C’est dans la mixité des publics qu’il questionne les structures culturelles les plus diverses et leur capacité à accueillir tous les publics sans les réduire à leur condition ou leur besoin. Dans notre conception de la mixité nous tenons à ne pas non plus réduire une personne à son identité et ses origines.
Toute médiation ne peut se faire qu’en tenant compte de la culture de l’autre, fut-elle celle de ses loisirs. On ne peut établir une passerelle entre la culture existante et les pratiques proposées sans tenir compte du fait que nous sommes confrontés aujourd’hui à des pratiques culturelles diverses où art, culture et loisirs se confondent. Si le médiateur culturel est forcément dépositaire de valeurs qui lui sont propres et d’un discernement sur ce qu’il propose comme activités, s’il lui est difficile de conserver une neutralité dans le cadre de l’accompagnement des publics, il ne peut concevoir son métier sans être prêt à investir le terrain culturel de l’autre, fut-il le plus éloigné de ses pratiques. Notre ambition est de contribuer à une libre circulation des biens culturels et des publics. Le combat à mener est bien une conquête physique et symbolique des différents territoires de la culture où tout individu est à même de dépasser ses habitudes, ses à priori et ses appréhensions.
Nous affirmons que la gratuité constitue un barrage en moins dans la fréquentation des lieux culturels pour les personnes les plus isolées. La gratuité se travaille dans le temps pour ne jamais réduire « gratuité » à « sans valeur ». Elle est un outil et un principe actif à défendre dans un cadre de partage des biens culturels. La gratuité est un moyen qui peut contribuer à lever les freins pratiques et symboliques à la fréquentation d’une structure ou d’une proposition artistique. Elle ne peut s’affranchir d’un travail d’accompagnement des publics et de concertation avec les différents partenaires qui s’y investissent. Nous sommes résolument pour cette gratuité dans un cadre social et destinée aux personnes les plus vulnérables.
En garantissant que chacun puisse se nourrir de références culturelles, puisse exprimer librement et sereinement son identité culturelle, on s’assure que chaque individu peut s’épanouir et s’émanciper dans la société. Encourager l’accès à la culture, c’est reconnaître, en plus des besoins fondamentaux (se nourrir, se loger, se soigner…), le besoin de l’homme en matière de relations, d’appropriation de connaissances, de construction d’une identité culturelle, d’affirmation de soi, de droit de cité… En cela, l’action de médiation culturelle que nous défendons s’inscrit dans la filiation de l’idéologie de l’éducation populaire:
- Miser sur la capacité de tous à enrichir son savoir, ses connaissances à travers des expériences collectives de confrontation aux objets culturels à caractère sensible, esthétique ou réflexif.
- Développer l’esprit citoyen en rendant acteurs les participants de l’action culturelle et en favorisant la liberté de la parole et du regard critique.
- Donner accès au plus grand nombre à la culture « officielle » sans pour autant discréditer les cultures dites « populaires ».
- Promouvoir les pratiques amateurs comme un vecteur d’enrichissement permanent.
La médiation culturelle est un moyen de réaffirmer le pouvoir de dire ou de faire pour tout individu
L’accès à la culture favorise l’esprit critique, le dialogue interculturel, œuvre pour une meilleure compréhension de soi et des autres, et concourt ainsi au ciment social, à l’exercice de la démocratie participative et de la citoyenneté. La médiation culturelle est un moyen d’exercer et d’affuter un esprit critique sur les œuvres où toute forme de proposition artistique. Elle est toujours une expérience de l’altérité si l’on considère que les modes de réception sont plurielles et que l’on encourage toute action vouée à les confronter. L’espace de médiation comme lieu désinhibé d’échange, de libre expression, de délibération constitue un rempart contre la pensée unique et/ou dominante. Nous nous opposons à l’idée d’un cénacle seul à même de juger et de faire vivre les œuvres en vase clos. Au-delà d’une vision collective, la médiation culturelle et les actions qui lui sont associées sont un exercice de la démocratie.
Le travailleur social peut-il devenir un médiateur culturel ? Ici réside un des enjeux de l’action de Cultures du Cœur. Peut-il le devenir dans son temps de travail et articuler action sociale et action culturelle ? Nous pensons que le travailleur social est un médiateur dès l’instant où il met en place des actions culturelles et des actions d’accompagnement des publics. Dans ce cadre, elles sont à associer à une démarche globale d’insertion.Sur le terrain de son exercice, le médiateur culturel qui intervient dans le champ social trouve un équilibre entre action sociale et action culturelle. L’accompagnement social inscrit les publics dans un parcours bien plus large que la simple fréquentation d’un lieu. Dans l’exercice de la médiation culturelle dans le champ social les mots « accompagnement » et « participation » sont à prendre à leur sens le plus large. « Accompagnement » et « participation » ne se réduisent pas à la simple confrontation aux œuvres. Les travailleurs sociaux impliqués dans la médiation culturelle conçoivent des espaces et des temps d’échange autour des œuvres et des pratiques culturelles où les émotions, réflexions ou pensées des publics peuvent s’exprimer librement. C’est dans ces contextes que les travailleurs sociaux développent des outils spécifiques où actions sociales et actions culturelles s’enrichissent.
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