Mixité

La mixité est une notion particulièrement récurrente dans les discours publics. Le fait de la préférer à celle de diversité est évocateur : en effet, dans son sens chimique d’origine, mixer consiste à mélanger des éléments jusqu’à en dissoudre les différences et obtenir un composé homogène. La mixité correspond donc au modèle français de la citoyenneté, qui vise l’universalité plutôt que le maintien des différences entre les individus.

Depuis les années 1970, la mixité est régulièrement invoquée comme un objectif à atteindre en matière d’urbanisme. En effet, à cette période correspondent l’édification des grands ensembles de logement, le phénomène des dits « quartiers difficiles » et la ségrégation spatiale qui les caractérise. Ce n’est pourtant pas dans ces quartiers que l’homogénéité sociale est la plus importante mais dans les beaux quartiers habités par les classes supérieures. Néanmoins, les quartiers difficiles constituent encore aujourd’hui le symbole d’une ségrégation spatiale à combattre par la promotion de la mixité.

Le paradoxe de la mixité réside dans le fait qu’il s’agit d’une notion à la fois omniprésente et très rarement définie ou questionnée. Son imprécision la rend le plus souvent inopérante étant donné qu’il est impossible de la mesurer sans la déterminer : parle-t-on de mixité sociale, générationnelle, ethnique, genrée… ?

Ainsi que l’ont montré de nombreux travaux en sociologie, la proximité spatiale n’engendre pas forcément la proximité sociale. Autrement dit, il ne suffit pas de faire cohabiter dans un même lieu des personnes différentes pour qu’elles se lient entre elles. Il apparaît donc primordial de poursuivre les efforts en matière de mixité et en particulier de favoriser les opportunités de « frottement social » entre différentes catégories de population. Il s’agit de cultiver une potentielle rencontre, de permettre la fréquentation de personnes différentes de soi en même temps que d’affirmer un principe démocratique en favorisant la mobilité et l’accès de toutes et tous aux différents lieux de la ville. Tout ce qui relève de l’espace public est à protéger en priorité, de plus en plus soumis à des tentatives de privatisations et de régulations de son usage. 

Focus

Postuler la mixité au cœur d’une démarche de médiation culturelle dans le champ social s’inscrit dans cette logique. Il s’agit d’affirmer le droit à chacun.e d’avoir accès à des espaces et à des pratiques culturelles et donc de s’opposer à la spécialisation de spectacles ou de lieux réservés à une certaine catégorie de public. Il s’agit au contraire de favoriser cette opportunité de rencontre, de frottement avec l’altérité Il s’agit, enfin, de trouver un équilibre entre « démocratisation de la culture » et « démocratie culturelle », c’est-à-dire d’œuvrer afin que chacun.e puisse exercer et valoriser ses propres pratiques et ses propres références culturelles au contact et au même titre que les autres dans le respect des droits culturels.