Ce programme propose une traversée poétique du répertoire pour violon et piano à la charnière des XIX^e et XX^e siècles, moment d’une grande richesse expressive dans la musique française. Entre ferveur lyrique, raffinement harmonique et profondeur introspective, trois voix singulières s’entrelacent ici : celles de César Franck, Ernest Chausson et Claude Debussy.

La Sonate pour violon et piano de Debussy, dernière œuvre majeure du compositeur, ouvre le programme dans un univers intérieur, fragmenté, sensible au silence et à l’évocation. La forme y devient fluide, l’harmonie, insaisissable. Derrière les allures capricieuses de l’Intermède central se laisse percevoir une mélancolie profonde, presque tragique. Debussy, lui-même affaibli par la maladie, comparait le Finale à « un jeu simple d’une idée tournant sur elle-même comme un serpent qui se mord la queue ».

En contraste et en écho, le Poème de Chausson déploie une narration libre et passionnée, conçue comme une rêverie musicale. D’abord écrit pour violon et orchestre, cette version avec piano conserve toute la densité dramatique et le lyrisme vocal de l’original.

Enfin, la Sonate en la majeur de Franck, véritable monument de la musique de chambre, clôture ce parcours avec un souffle ample et organique. Fondée sur un principe cyclique, l’œuvre conjugue ferveur romantique, tension dramatique et élévation spirituelle. Cette sonate inspirera Marcel Proust pour la sonate de Vinteuil, œuvre musicale jouant un rôle important dans A la recherche du temps perdu.

Ces trois pièces, chacune à sa manière, font dialoguer l’intime et l’infini, le geste expressif et le souffle poétique, offrant au violon un rôle de conteur, tantôt lyrique, tantôt méditatif.